Techniquement parlant...


Venez vêtus de noir, on fournit les cagoules...

Le 14 mars se rapproche. Dans quelques jours, nous prendrons possession des lieux: la brasserie haute de la Maison Folie de Moulins. Un camion maquillé d'un lys rouge aménera les lettres de la même couleur, l'alphabet est presque au complet. Symboliquement je pense l'achever là, puisqu'il faut jouer du symbole pour avancer. Le Niveau Zéro de l'Ecriture se met en place progressivement et il faut y voir là une étape cruciale de ce projet global (dont la réalisation d'une phrase de deux kilomètres de long sur une plage du nord reste le leitmotiv de toute cette agitation). Il est clair que nous pourrions agir directement, mais le facteur "Temps" est lui aussi un élément important que nous tenons, à travers la durée de ce projet, à mettre en avant. Son développement sera réellement durable. Sa réalisation non. Puisque la phrase, écrite, ne restera pas je crois. Pas plus d'un week end sans doute. De l'écrit éphémère. Plus une parole, sans doute...

Mais revenons à l'opération engagée " Diciton Directe". Sa genèse est récente. Sans doute le projet pyrénéen "poésie/poesìa" était avant coureur pour ce qui est de la création d'un groupe d'intervention: une lettre portée par un être. Le reste vient de ma pratique, du maniement des lettres dans chaque acte d'écriture sur paysage et de mes déplacements avec elles, sur l'épaule, ou sous le bras, le tout lié à une certaine jubilation, propre à cette posture de jeu langagier.

"Diction directe" est, avant toute chose, née d'une invitation. Un vent fort souffle de l'Est. Les sens sont en éveil. Je repense à cette vieille légende transylvanienne à la dent dure et aux canines éfilées: un vampire jamais ne s'introduit dans une maison sans une invitation. Dimitri Vazemsky allait pouvoir s'incarner, ici, dans la mélancolie de Moulins. Nous sommes en lisières du récit, les lettres rouges vont couler, liquides, sens, il faut leur trouver un projet, les inscrire dans un lieu, là où les décisons doivent se prendre sans que, pour autant, tout soit déjà joué.

L'espace est posé. La brasserie haute, avec son bout de cheminée parlant d'une révolution industrielle passée et traversant cet espace aux formes connues et reconnues: l'archétype de la maison, un cube surmonté d'un triangle. On me demande de choisir la couleur: Berlin ou Istanbul.
Et le projet se monte, d'escadrons lettrés. Berlin est choisi, intuitivement, sans doute pour les grosses lettres rouges ayant traînées pendant des années dans la cour du Tacheless, et puis cette histoire de mur. Et sa chut... Le reste est silence.

Mes lettres en bois rouges, ma casse d'imprimeur sur paysage, sont prêtes depuis le début, anticipant la chute de tous les murs. Le graffiti sera mort, mes lettres vivront encore. Mes lettres sont leur propre support, elles se posent, ici ou là, murs ou pas. Le graffiti est dépendant d'un appui. Mes lettres tiennent debout. L'avénement de l'"Aux mots erectus".

Toujours est-il que, dans mon esprit vague, se sont mélangés plusieurs ingrédients donnant cette combinaison: "Diction directe, attentats poétiques (berlin-moulins 2009)". Et puis moi je fais dans la linguistique, j'interroge la place de du langage dans l'espace public, détournant des codes publicitaires (les grosses lettres) pour poser des actes gratuits, un éclat de poésie dans le meilleur des cas, rouge dans le paysage. Interrogeant sans apporter de réponses claires, loin des référents directs hurlant la marque déposée. Me jouant d'un médium qui n'est pas le mien.
Genre.

Genre

...et puis aussi je crois que je m'interroge sur la façon dont on utilise le langage, non plus pour dire des choses, mais uniquement pour communiquer.
Et ça je ne sais pas si c'est bon.
Alors je m'interroge.

Dans Shakespeare, quand le langage en arrive à ce stade, la tragédie est posée. L'idée aussi qu'à trop user de mots creux, gonflés à l'hélium, on en arrive à un constat d'impuissance de toute discussion. La fin de l'échange. Le début de l'action. Cette lisière-là me questionne aussi. Toujours. Celle de l'engagement de l'écriture.
(Je répéte, je n'ai pas dit "l'engagement de la littérature")

Ecrivain à la base, je suis passé d'une démarche d'écriture traditionnelle, crayon & clavier, à celle de la circulaire. La scie circulaire. Je découpe des lettres lourdes et volumineuses qui prennent des plombes à installer pour écrire un seul mot bien placé dans le paysage.
Mon mot est plus visible. Mais il reste silencieux.

Là où par la prolifération linéaire de mots juxtaposés comme je le fais ici je peux m'expliquer plus en profondeur et entamer une individuation. De l'autre côté, dans cette unicité du "gros" mot posé, je travaille un signe qui ne fera lien que par son sens communs, son consensus...
Deux mouvements s'opposent.
Ou se posent, l'un à côté de l'autre.

Mais il est tard, je me relirai demain...

Groupe du 14 mars 2009


La date de l'opération est posée. 14 Mars 2009.
S'exposer. Enfin. Aux yeux de tous.
Un atelier clandestin.
De typographe urbain.
à visiter...

Comment engager la littérature dans le quotidien?
Lire (autre chose) et dire (autre chose que ce que l'on veut peut-être nous faire dire...)
est devenu un acte de résistance...
mais on vous en dit plus bientôt...
et directement!

En espérant que vous rejoindrez ce mouvement engagé.
L'atelier clandestin se cachera dans
la Maison Folie de Moulins, du 14 mars
et cela jusqu'à son démentellement complet, début mai...

Venez partager de grands moments de complicités,
et par votre présence, inscrivez vous dans un processus
non encore écrit, et n'attendant que vous...

...vous, voyeur ou acteur?